La solitude professionnelle du freelance : l’autre vérité du métier

|Fransly MIENANTIMA-LEPHASSY
La solitude professionnelle du freelance : l’autre vérité du métier

On parle beaucoup de liberté quand on évoque le freelancing.
Un peu de courage.
Parfois d’argent.
Toujours de clients.

Mais on parle très rarement de la solitude.
Pas la solitude “j’ai personne autour de moi”,
mais celle qui s’installe doucement, silencieusement :
la solitude professionnelle.

Celle où tu travailles seul,
penses seul,
doutes seul,
décides seul,
et avances seul — même quand tu es entouré dans ta vie personnelle.

Cette solitude-là n’est pas un accident.
Elle est une composante du métier.
Et le jour où tu l’acceptes vraiment,
tu arrêtes de la subir et tu commences à en faire une force.

Ce texte déplie cette réalité.
Non pas pour te faire peur,
mais pour t’aider à comprendre ce que tu ressens — et comment vivre avec.


1) Ce n’est pas le travail qui pèse : c’est l’absence d’un “nous”

Dans un job salarié, le “nous” est partout.
Même si tu n’aimes pas ton équipe, tu appartiens à un cadre.
Quand tu avances, tu avances avec.
Quand tu échoues, tu échoues dans une structure.
Quand tu doutes, tu doutes entouré.

Mais en freelance, ce “nous” disparaît.

Tu deviens :

  • ton service marketing,

  • ton service commercial,

  • ton service compta,

  • ton service communication,

  • ton service qualité,

  • ton service motivation.

Ton cerveau doit porter seul ce que d’autres répartissent dans des équipes entières.

La solitude professionnelle, c’est ça :
être l’unique responsable de ton mouvement.


2) Le paradoxe : tu es libre, mais tu es seul avec ta liberté

La liberté fait rêver, mais elle a un revers qu’on ne dit pas assez :
elle te laisse face à tes choix.
Tous tes choix.

Ce qui, au début, peut être vertigineux.

Quand tu dois décider :

  • ton prix

  • ton offre

  • ton positionnement

  • tes outils

  • ton planning

  • ton site

  • tes premiers clients

  • tes contenus

Tu n’as plus ni chef, ni équipe, ni pair direct pour valider.

Tu as toi.
Et parfois, c’est trop peu.

Cette liberté-là, quand elle n’est pas accompagnée,
devient une solitude mentale lourde.


3) La solitude crée du doute — même chez les plus compétents

Quand personne ne voit ton travail,
tu finis par te demander s’il vaut quelque chose.

Quand personne ne te dit si tu es sur la bonne voie,
tu commences à douter que la voie existe.

Quand personne ne te renvoie de feedback,
tu interprètes le silence comme un manque de valeur.

C’est normal.
Le cerveau humain n’est pas fait pour fonctionner sans écho.

Le freelancing, c’est travailler dans une pièce fermée.
Et tu dois apprendre à créer toi-même la résonance qui te manque.


4) La solitude du freelance n’est pas que professionnelle : elle touche l’identité

On ne se rend pas compte d’une chose avant de se lancer :
le travail définit une part de ton identité.

Quand tu n’as plus un rôle “officiel”,
tu dois le reconstruire.
Et ce travail-là, personne ne le voit.
Personne ne t’aide à le faire.
Personne ne le valide.

C’est un chantier intérieur.

Tu dois répondre seul à ces questions :

  • Qui je suis professionnellement ?

  • Quelle est ma valeur ?

  • Qu’est-ce que je veux apporter ?

  • À qui est-ce que je parle ?

  • Qu’est-ce que je refuse désormais ?

Ces questions sont simples en apparence,
mais elles sont intimes, profondes, parfois douloureuses.

La solitude les rend plus fortes.


5) Le mythe du freelance extraverti (spoiler : la plupart ne le sont pas)

On imagine souvent les freelances comme :

  • sociables

  • ouverts

  • à l’aise en visio

  • naturellement communicants

  • toujours connectés

Mais dans la réalité,
une immense partie d’entre eux sont :

  • introvertis,

  • calmes,

  • silencieux,

  • sensibles,

  • enclins à douter.

Ils se sentent encore plus seuls
parce qu’ils croient être les seuls à se sentir seuls.

C’est faux.
La solitude n’est pas un trait de caractère.
C’est un environnement mental auquel il faut apprendre à s’adapter.


6) La solitude crée une distorsion du temps

Ce qui surprend beaucoup de freelances débutants,
c’est ce phénomène étrange :

  • tu peux être débordé,
    et pourtant te sentir isolé.
  • tu peux n’avoir “rien fait”,
    et cependant être mentalement épuisé.

La solitude fausse ton rapport au temps.
Elle augmente la fatigue.
Elle amplifie les doutes.
Elle rend les journées plus longues… ou très courtes.
Ce ne sont pas tes tâches qui fatiguent :
ce sont les pensées non partagées.

Parler à quelqu’un n’allège pas ta to-do,
ça allège ton intérieur.


7) Comment vivre avec la solitude (et ne plus la subir)

Voici une méthode FreelanceStuffs en cinq (5) gestes simples, mais puissants.

a. Avoir un rituel d’expression (même minimal)

Tous les jours, écris une phrase :

“Aujourd’hui, j’ai appris que…”
ou
“Aujourd’hui, je me sens…”
ou
“Aujourd’hui, j’ai avancé sur…”

Cette trace te connecte à toi-même.
Elle réduit la sensation de stagnation.
Elle donne une continuité intérieure à ton activité.

b. Avoir au moins une conversation par semaine avec un autre freelance

Pas un coaching.
Pas une masterclass.
Pas une formation.

Une conversation humaine.

Partage :

  • ce que tu vis,

  • ce que tu comprends,

  • ce qui te bloque.

Le simple fait de dire les choses réduit leur poids.

La solitude ne disparaît pas parce que tu as des gens.
Elle disparaît quand tu as des pairs.

c. Te créer une structure invisible

En freelance, tu ne peux pas compter sur un cadre extérieur.
Alors, tu dois te créer une structure intérieure :

  • un planning simple,

  • des plages horaires stables,

  • des rituels (matin, midi, fin de journée),

  • un espace clair (physique ou digital),

  • des outils qui te guident,

  • un cadre éditorial pour communiquer.

La solitude devient oppressante quand elle est désorganisée.
Elle devient supportable quand elle est structurée.

d. Faire exister ton travail publiquement

Poster sur LinkedIn, même une fois par semaine,
change profondément ta perception de toi-même.

Tu sors de ta tête.
Tu existes quelque part.
Ton travail n’est plus seulement “en toi” :
il vit dans un espace où quelqu’un peut le voir.

Le freelancing devient moins solitaire
dès que tu prends la parole.


e. Ne plus attendre le “bon moment” pour demander de l’aide

La solitude professionnelle est souvent entretenue par l’orgueil.

“Je dois y arriver seul.”
“Je dois prouver que je peux.”
“Je ne veux pas déranger.”

Mais en freelancing,
le vrai courage n’est pas de tout faire seul.
Le vrai courage, c’est de savoir demander.

Une question posée aujourd’hui
économise six mois de solitude.


8) La solitude disparaît quand tu changes ta perspective

Ce qui change la vie d’un freelance qui débute,
ce n’est pas d’avoir plus de clients,
plus d’argent,
ou plus de followers.

C’est de comprendre ceci :

Tu es seul dans ta forme de travail.
Mais tu n’as pas à être seul dans ton parcours.

C’est une nuance essentielle.
Une nuance qui change la respiration.

Tu peux travailler seul,
mais tu peux t’entourer pour penser.
Tu peux créer seul,
mais tu peux partager ton voyage.
Tu peux décider seul,
mais tu peux demander des avis.

La solitude cesse d’être un poids
quand tu l’équilibres volontairement.


9) La solitude professionnelle n’est pas un problème : c’est une compétence

Quand tu apprends à vivre avec elle,
elle devient une force.

Elle te donne :

  • une clarté mentale plus profonde,

  • une capacité à créer du calme,

  • une maturité professionnelle,

  • une intuition plus fine,

  • une autonomie réelle,

  • une confiance qui ne dépend de personne.

Ce n’est pas un retrait.
C’est une autonomie intérieure.

La solitude que tu vis aujourd’hui
est en train de devenir
la stabilité que tu auras demain.


Conclusion : la liberté demande de la solitude, mais pas d’être isolé

La solitude professionnelle n’est pas là pour t’écraser.
Elle est là pour t’aider à apprendre
à être avec toi-même.

Ce n’est pas la partie la plus facile du métier.
Mais c’est l’une des plus fondatrices.

Et ce que tu construis dans cette solitude,
personne ne pourra jamais te l’enlever :

  • ta capacité à réfléchir,

  • ta capacité à décider,

  • ta capacité à avancer,

  • ta capacité à te faire confiance.

Tu n’es pas seul.
Tu es en train de devenir autonome.

C’est la nuance qui sépare
ceux qui abandonnent
de ceux qui deviennent vraiment libres.